C’est une maison en pierre blanche des années 1850, à la sortie du village de Saponay, dans l’Aisne. Depuis l’an dernier, elle abrite un charmant gîte baptisé La Petite Châtelaine, en hommage à Camille Claudel. Corinne Menu, propriétaire, qui a veillé avec soin à la rénovation de cette maison de famille, est intarissable sur la sculptrice, née à Fère-en-Tardenois. Elle n’hésite pas à conseiller à ses hôtes une visite de la Maison Camille et Paul Claudel, à Villeneuve-sur-Fère, à deux pas de là. Un lieu intime et inspirant, où la belle Camille se dévoile un peu plus…
Au premier étage, une œuvre contemporaine de Barbara Petit représente à sa manière La Petite Châtelaine. « C’est la première chose que nous avons achetée », raconte Corinne. Une trouvaille sur internet, un peu par hasard, comme un clin d’œil du destin.
À la question « Camille Claudel a-t-elle connu votre maison ? », Corinne Menu sourit. « Qui sait ! Peut-être est-elle passée devant, accompagnant son père, receveur de l’enregistrement ou, si vous préférez, fonctionnaire d’État aux impôts ».
Mis à part ce point de détail, la propriétaire du gîte La Petite Châtelaine sait tout ou presque de la vie tourmentée et fiévreuse de la belle Camille. Dont elle a voulu faire revivre l’époque à travers la déco de cette maison de famille, achetée naguère par son grand-oncle.
La Petite Châtelaine, couleur Belle Époque
Elle, qui a tenu une maison d’hôtes dans la Marne pendant 20 ans, a mis tout son cœur à donner une couleur Belle Époque à La Petite Châtelaine. Des meubles et des objets de famille mais aussi des trouvailles faites chez les brocanteurs, ici ou ailleurs.
La petite table ovale de la chambre ? Corinne l’a trouvée à Soissons, avant de la restaurer et de la patiner.
La table ronde de la cuisine ? C’est une ancienne table de bistrot anglaise, achetée à Rouen. Sa pastille en céramique affichant le chiffre 8 est un clin d’œil à la date de naissance de Camille, venue au monde un 8 décembre 1864.
Quant aux abat-jour des tables de nuit brodés d’un « C », ils sont un rappel des initiales de Camille Claudel. Évidemment.
La Petite Châtelaine version contemporaine
Mais l’esprit Belle Époque de La Petite Châtelaine ne l’empêche en rien de vivre dans son temps. La cuisine est magnifiquement équipée, la salle de bain est luxueuse, tandis qu’un poêle Godin moderne réchauffe les fraîches soirées. Dehors, des vélos électriques, tels de fiers destriers, attendent de parcourir la belle campagne alentour.
Au premier étage, à côté d’une méridienne, une œuvre contemporaine de Barbara Petit-Lisy représente à sa manière La Petite Châtelaine. « Cet achat a été un vrai coup de cœur et le point de départ de notre projet », raconte Corinne. Une trouvaille sur internet, un peu par hasard, comme un clin d’œil du destin.
« C’était évident pour moi d’appeler notre nouveau gîte La Petite Châtelaine. Parce que c’est l’une des œuvres emblématiques de Camille Claudel. Mais aussi parce que la jeune fille représentée est Marguerite Boyer, la fille du propriétaire du château de l’Islette, près d’Azay-le-Rideau. C’est là que Camille retrouvait Rodin au temps de leurs amours ». C’est d’ailleurs là aussi qu’elle sculpta La Petite Châtelaine, dont une version en bronze est en exposition permanente au château. Et présentée, bien sûr, au musée de La Piscine de Roubaix.
Le clocher de Villeneuve-sur-Fère à l’horizon
La belle vie à la campagne, proposée par le gîte La Petite Châtelaine, se prolonge dans la prairie à côté de la maison. Corinne et son mari y ont aménagé un charmant cabanon, pour des siestes à l’ombre, un coin d’où l’on voit, au loin, le clocher de l’église de Villeneuve-sur-Fère.
On peut également se faire un petit plaisir en s’installant dans les fauteuils de jardin et en dégustant le champagne La Petite Châtelaine, élaboré dans la Marne par Jean-Philippe Menu, mari de Corinne, et qui attend sagement au frigo…
Gîte La Petite Châtelaine en pratique
3 rue du Moulin, 02130 Saponay
150 € la nuit (chambre pour 2 et canapé-lit pour 2).
Renseignements au 06 65 56 24 05 ou gitelapetitechatelaine@gmail.com
Également une offre packagée sur
https://www.weekend-hautsdefrance.com/nature/la-petite-chatelaine-maison-cocon-sur-la-route-du-champagne
À quelques kilomètres de là, à Villeneuve-sur-Fère…
À deux pas de La Petite Châtelaine, Villeneuve-sur-Fère, son église Saint-Georges et son ancien presbytère, devenu en 2018 la Maison de Camille et Paul Claudel. Autant dire qu’il serait dommage de ne pas la découvrir…
Pourquoi la Maison de Camille et Paul Claudel vaut la visite ?
Venir à Villeneuve-sur-Fère, c’est d’abord découvrir un village qui a très peu changé depuis l’époque des deux artistes. La place est restée telle qu’en elle-même, avec ses tilleuls et son ambiance incroyablement paisible.
L’ancien presbytère, une bâtisse du XVIIIe, avait été achetée par les ancêtres de Madame Claudel, après la Révolution… C’est là, dans cette maison où la famille Claudel passe plusieurs étés, que Paul a vu le jour, le 6 août 1868. Ses deux sœurs, Louise et Camille, sont quant à elles nées à Fère-en-Tardenois.
Cette maison de famille, c’est le lieu de jeunesse des deux artistes, leur Madeleine de Proust à eux. Avec sa simplicité, son charme et son joli jardin, où s’épanouissent des rosiers baptisés Camille Claudel et Auguste Rodin.
Mais c’est aussi là qu’ils prennent conscience de leur vocation et forgent leur sensibilité, au contact de la terre du Tardenois. Dans cette région très argileuse, il suffit de gratter pour trouver la matière première, dont Camille fera des merveilles.
Camille et Paul n’oublieront jamais Villeneuve-sur-Fère, y revenant régulièrement une fois adultes.
Malgré quelques travaux, la Maison Camille et Paul Claudel est plus ou moins restée dans son jus. Et on n’a aucune peine à y imaginer la vie familiale, même sans meubles et objets d’origine.
Plutôt Camille ou plutôt Paul ?
Pas de doute, la star, ici, c’est Camille ! La majorité des visiteurs viennent pour elle, curieux d’en savoir plus sur cette artiste trop souvent comparée à Rodin et qui a dû se battre pour faire reconnaître son art, les Beaux-Arts étant alors interdits aux femmes. Camille et sa passion amoureuse pour Rodin, Camille et sa lente descente aux enfers, Camille et ses trente ans d’internement, d’isolement et de solitude.
Mais tout cela ne signifie pas qu’il n’y a rien à découvrir sur Paul… bien au contraire. « Au fil des salles, une curiosité s’installe pour Paul, même si les visiteurs viennent au départ plutôt pour Camille », souligne Claire, notre guide.
Deux artistes et deux étages, cela tombe bien ! L’œuvre de Camille est ainsi présentée au rez-de-chaussée, tandis que l’univers et la vie de Paul sont contés à l’étage.
Que découvre-t-on de et sur Camille au rez-de-chaussée de la Maison ?
On n’est pas ici dans un grand musée parisien et il ne faut donc pas s’attendre à voir des dizaines d’œuvres ! On est plutôt dans l’évocation, grâce au fonds de l’Association Camille et Paul Claudel.
Mon coup de cœur absolu va à La Valse (copie moderne d’un bronze de 1895), une œuvre majeure de Camille Claudel. J’adore l’impression de mouvement et de tourbillonnement qui s’en dégage. Et pourtant, le joli drapé qui participe à cette impression, a été rajouté par la suite. Eh oui, les danseurs étaient à l’origine nus. Mais, devant la levée de boucliers de la critique, la sculptrice a préféré ajouter un (merveilleux) drapé.
À ne pas manquer non plus Diane, un plâtre réalisé environ en 1881, l’une des premières œuvres de Camille, alors âgée de 16 ans. Le style est encore balbutiant et très classique mais je trouve chouette que la Communauté d’agglomération de Château-Thierry ait pu acquérir ce plâtre, longtemps resté dans une collection privée.
À voir aussi L’Implorante, copie moderne d’un bronze de 1887, et la photo de L’Abandon, un superbe bronze exposé au musée municipal de Cambrai.

Et que découvre-t-on sur Paul au premier étage ?
On grimpe un étage et, dans le couloir, quatre photographies permettent de découvrir les paysages du Tardenois, tels que Paul les a décrits dans Mon Pays. C’est cette vue sur un horizon indéfini qui lui a donné une irrépressible envie de voyager.
Consul puis ambassadeur (même s’il a un temps envisagé de rentrer dans les Ordres !), il roulera ainsi sa bosse entre Prague, Hambourg, Rio de Janeiro, Copenhague, Tokyo, Washington, Bruxelles et Shangaï, notamment. Ce faisant, il réalisera à la fois ses rêves de voyages, d’horizons lointains et d’écriture.
Au fil des vitrines et des documents, on découvre ainsi la belle carrière de Paul Claudel mais aussi son œuvre. Toute une salle est consacrée au théâtre, présentant affiches, photos, dessins de costumes de Tête d’Or, Le Soulier de Satin ou L’Annonce faite à Marie.
Mais on entrevoit également les contradictions de l’homme, qui a notamment connu une immense passion adultérine avec Rosalie, femme mariée, dont il aura une fille, Louise.
Une salle des destins croisés
Même si frère et sœur sont assez proches de caractère, Paul est bien plus ancré dans la vie. Il a créé sa propre famille. Il vit de son métier et pas de son art, sera édité, joué et reconnu. En 1946, il est élu à l’Académie française, consécration suprême.
Parallèlement, il essayera toujours de favoriser le travail de sa sœur, même s’il estimera que celui-ci « n’a abouti à rien ». Une opinion très dure, rappelée dans la dernière salle, celle des destins croisés entre les deux artistes.
Si Camille a toujours gardé un amour infini pour « son petit Paul », ce dernier l’a soutenue (notamment financièrement) pendant ses 30 ans d’internement. Mais sans doute pas comme elle l’aurait espéré. À sa mort, en 1843, Camille sera enterrée dans une fosse commune, à Montfavet, près d’Avignon.
Maison de Camille et Paul Claudel en pratique
42 place Paul Claudel, 02130 Villeneuve-sur-Fère
03 23 71 94 72
Ouvert jusqu’au 31 octobre 2025, puis fermé jusqu’au printemps prochain.
Ouvert du mercredi au dimanche, de 10 h 30 à 12 h 30 et de 13 h 30 à 18 h.
Tarifs : 5 € adultes. Étudiants, – 18 ans, demandeurs d’emploi, personnes en situation de handicap gratuit.
Visites guidées : 7 € adultes, étudiants et – 18 ans gratuit. Demandeurs d’emploi et personnes en situation de handicap 3 €.
Un festival Camille Claudel se tient chaque année début juillet à Fère-en-Tardenois.
Lire ici https://www.carct.fr/agenda/evenement/festival-camille-claudel-48-1#:~:text=Le Festival Camille Claudel se,terres natales de Camille Claudel.
Un festival Camille Claudel se tient chaque année début juillet à Fère-en-Tardenois.
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