Le MUDO de Beauvais mise aussi sur le 20e

Vous aimez l’Art nouveau, l’Art déco et autres tendances artistiques du 20e ? Vous êtes tout autant curieux des grands mouvements du foisonnant 19e ? Rendez-vous au MUDO-Musée de l’Oise de Beauvais, qui a rouvert ses portes ce printemps, après cinq années de fermeture. J’ai eu un vrai coup de cœur pour ce très beau musée, qui fait découvrir deux siècles d’art en France et au-delà. Avec, au premier étage, un nouvel accrochage des œuvres du 19e. Et, au deuxième, une toute nouvelle section rassemblant peintures, sculptures, objets d’art et ensembles mobiliers racontant ce 20e siècle, qui fait déjà partie de l’Histoire… 

La grande nouveauté du MUDO-Musée de l’Oise de Beauvais est son parcours consacré au 20e siècle, au deuxième étage du bâtiment. Des collections allant de l’Exposition universelle de 1900 jusqu’aux années 1970…

Réouvert au printemps dernier, c’est fou ce que le MUDO de Beauvais fait penser à un château Renaissance ! Normal, le Musée de l’Oise est installé dans l’ancien palais épiscopal, édifié au 12e mais entièrement reconstruit au 16e siècle, dans un esprit Renaissance. Blancheur immaculée, ornementations, encadrement des fenêtres, au premier abord on croirait un château de la Loire, égaré dans l’Oise… 

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Flanquée de deux tours du 14e, la résidence des évêques de Beauvais avait à la fois un caractère défensif et une fonction d’apparat. Mais ces temps sont révolus et, magnifiquement restauré, l’ancien palais est aujourd’hui un écrin de choix pour des collections plutôt exceptionnelles. 

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Mes coups de cœur 19e

Ouvert depuis mars dernier, le nouveau parcours propose de découvrir un 19e siècle en perpétuel renouvellement. Plus de 160 œuvres retracent, dans un accrochage repensé, ce siècle fécond, traversé par de nombreux mouvements artistiques, avec un zoom particulier sur la peinture de paysages.
Voici mes 6 coups de cœur, au fil des salles :

1. Paris, le vieux pont Saint-Michel, Camille Corot,  1823-1824

Beauvais-musee-de-loise-MUDO-Paris-le-vieux-pont-Saint-Michel-Camille-corot©RMN-Grand Palais (MUDO – Musée de l’Oise) Hervé Lewandowski

Camille Corot, c’est l’un des grands noms de la peinture, dont le MUDO de Beauvais a la chance de posséder trois œuvres de jeunesse, qui témoignent de l’évolution de son art.

J’aime beaucoup ce Paris, le Vieux Pont Saint-Michel, réalisé dans des tons bruns et mordorés. Pour Corot, qui a donné ses lettres de noblesse au paysage, le sujet n’est pas la cathédrale Notre-Dame. Non, c’est le pont, son reflet dans l’eau et l’ensemble des éléments environnants. Et c’est bien là la nouveauté de l’époque. Le paysage n’est plus juste un décor ou un prétexte. Il devient le sujet principal du tableau et ça, c’est révolutionnaire !

2. Le Retour du Grognard, Paul Huet vers 1825-1826

Beauvais MUDO Le Retour du Grognard, Paul Huet, 1821, huile sur toile
Le Retour du Grognard, Paul Huet, 1821, huile sur toile

Comme lors de ma première visite au MUDO, en 2017, je suis restée scotchée devant Le Retour du Grognard, une huile sur toile signée Paul Huet. Ce paysage romantique, qui s’inscrit dans un autre courant de la peinture du 19e, montre à sa façon la solitude et la désillusion d’un cavalier de l’armée napoléonienne. 

Ciel couleur de plomb, subtiles couleurs de la lande et désolation qui émane de l’ensemble : difficile d’échapper au sentiment de malaise et d’oppression qu’a voulu faire ressentir Paul Huet.

3. Vue du Nil de Basse Egypte de Prosper Marilhat, vers 1840

Beauvais MUDO Vue du Nil de Basse-Égypte, Prosper Marilhat, vers 1840, huile sur bois
Vue du Nil de Basse-Égypte, Prosper Marilhat, vers 1840, huile sur bois

Autre courant qui atteint son apogée en France au 19e : l’orientalisme et ses rêves d’ailleurs. L’amélioration des moyens de transport permet à davantage d’artistes de voyager, parmi lesquels Prosper Marilhat, qui séjourne notamment en Égypte. Des années après son retour, il exécute, d’après ses études et esquisses, ce paysage de la ville de Rosette. Délicatesse des petits nuages roses, élégant reflet des bâtiments dans l’eau… C’est un paysage poussé à l’extrême, presqu’une photo de cette réalité que le peintre a observée. Son but ? Faire rêver la vieille Europe et célébrer le voyage !

4. La Vierge en buste, Jean-Auguste-Dominique Ingres, vers 1850

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Vierge en buste, Ingres, vers 1850

Comment ne pas tomber en admiration devant La Vierge en buste de Jean-Auguste-Dominique Ingres ? Faisant partie des rares tableaux religieux du peintre, il est entré dans les collections du MUDO en 1999, après plus d’un siècle dans des mains privées…

Avec cette œuvre s’inscrivant dans le renouveau de l’art religieux, Jean-Auguste-Dominique Ingres se pose en héritier de Raphaël, fabuleux peintre de la Renaissance italienne. Expression recueillie, yeux baissés, voile d’un bleu intense, j’ai, moi aussi, immédiatement pensé à ce Raffaello Sanzio, dont j’avais visité la maison natale à Urbino, dans les Marches.

5. Le Château de Pierrefonds, Emmanuel Lansyer, vers 1865-1869

Beauvais MUDO Le Château de Pierrefonds Emmanuel Lansyer 1868 Huile sur toile
Le Château de Pierrefonds, Emmanuel Lansyer, 1868, huile sur toile

Je pourrais vous parler du nationalisme romantique du 19e et de cette volonté de préserver les monuments détruits ou abimés durant la Révolution. Mais je vais me contenter d’évoquer la forteresse de Pierrefonds, dont Viollet-le-Duc a transformé les ruines en un monument totalement nouveau. 

J’adore ce château (lire aussi ICI) de conte de fée, romantique en diable, que je ne me lasse pas de visiter. Ce tableau d’Emmanuel Lansyer a l’art de le sublimer. Ce qui n’est pas étonnant lorsqu’on sait que le peintre a commencé sa carrière comme dessinateur d’architecture sous Viollet-le-Duc…

6. Moret, le chantier naval à Matrat d’Alfred Sisley, 1882

Beauvais MUDO Moret, le chantier naval à Matrat, Alfred Sisley, 1882, huile sur toile
Moret, le chantier naval à Matrat, Alfred Sisley, 1882, huile sur toile

Mais le 19e siècle n’est-il pas avant tout celui de l’Impressionnisme ? Siècle de l’industrialisation et de l’urbanisation, il a amené avec lui une nouvelle envie de nature et de couleur. Moret, le chantier naval à Matrat d’Alfred Sisley, entré par legs au MUDO de Beauvais, s’inscrit bien dans cette tendance. Admirez le travail par petites touches de l’artiste. Contemplez la délicate palette de verts utilisée par cet amoureux des paysages. Et observez la lumière, si chère aux Impressionnistes.

Mes coups de cœur 20e

Mais la grande nouveauté du MUDO-Musée de l’Oise de Beauvais est son parcours consacré au 20e siècle, au deuxième étage du bâtiment. Des collections allant de l’Exposition universelle de 1900 jusqu’aux années 1970, parmi lesquelles voici également mes 5 œuvres préférées.

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L’Hymne à la mer, Alphonse Osbert, huile sur toile, 1893

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1. La salle à manger pour A. Bauwens, G. Serrurier-Bovy, 1897-1899

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Entrée dans les collections du MUDO de Beauvais dans les années 1970, revoici cette salle à manger, dans une nouvelle présentation. Elle est signée de l’architecte liégeois Gustave Serrurier-Bovy, disciple d’Henry van de Velde, l’un des fondateurs de l’Art nouveau belge.

Serrurier-Bovy, qui s’est toujours efforcé de produire des meubles à la fois beaux et accessibles à tous, a imaginé cet ensemble mobilier pour la demeure de l’avocat bruxellois Albert Bauwens. En bois de noyer, il allie grâce et légèreté mais aussi un art très sûr d’entremêler les courbes pour créer de délicats entrelacs. J’adore ! 

2. Jardin au clair de lune, Henri Le Sidaner, vers 1909-1910

Beauvais MUDO Jardin au clair de lune, Henri Le Sidaner, vers 1909-1910, huile sur toile
Jardin au clair de lune, Henri Le Sidaner, vers 1909-1910, huile sur toile

Combien Henri Le Sidaner (lire aussi ICI) a-t-il peint de jardins ? Je ne saurais dire. Mais ce que je sais, c’est que rien que des tables au jardin, il en a déjà peint quatre cents ! Fils d’un capitaine au long cours, né à l’île Maurice, il a vécu à Dunkerque et à Étaples-sur-Mer, avant d’acheter une maison de campagne à Gerberoy, dans l’Oise, sur les conseils de… Auguste Rodin.

Pour ce tableau, Henri Le Sidaner s’est-il inspiré de ses propres jardins, qui existent toujours dans le beau village de Gerberoy, affichant même le label « Jardin remarquable » ? Je l’ignore mais j’aime beaucoup l’ambiance intimiste et un brin mystérieuse qui s’en dégage. 

3. La Cheminée aux paons, Auguste Delaherche, 1923-1927 

Cheminée aux paons, Auguste Delaherche, 1923-1927, bois de citronnier, grès glaçuré
Cheminée aux paons, Auguste Delaherche, 1923-1927, bois de citronnier, grès glaçuré

Vous connaissez certainement le verrier Émile Gallé, peut-être moins son ami Auguste Delaherche. Pourtant, ce natif de Beauvais compte parmi les pionniers dans le domaine de la céramique. Qui a, à sa façon, contribué au rapprochement entre beaux-arts et arts décoratifs. 

Dans les années 20, une œuvre monumentale lui avait été commandée pour décorer le château de Léoube, dans le Var. Passionné par la nature, Delaherche s’était inspiré de son jardin et des paons qui s’y baladaient pour décorer son chef-d’œuvre. 

C’est ce puzzle géant de 104 pièces, en grès émaillé polychrome, que le MUDO de  Beauvais a pu acquérir en l’an 2000 et qu’on peut désormais admirer.

4. Les Tympans, Max Blondat, 1925

La Présentation des remises de Créance, Max Blondat 1925
La Présentation des remises de Créance, Max Blondat 1925

Ces deux tympans ajourés, signés Max Blondat, avaient été présentés à l’exposition des Arts décoratifs de Paris, en 1925. Celle-là même qui a lancé le mouvement Art déco.
Les deux tympans, aux décors différents, se faisaient face dans le Pavillon de l’Ambassade française, plus précisément dans la salle à manger dite d’apparat. 

L'arrivée au port de Monsieur l'Ambassadeur Max Blondat 1925
L’arrivée au port de Monsieur l’Ambassadeur, Max Blondat, 1925

Fan d’Art déco, j’adore l’esthétique de ces éléments appartenant au MUDO de Beauvais et présentés pour la première fois depuis l’exposition des Arts décoratifs.
Pourtant, tout le monde n’a pas toujours été de mon avis… Ainsi, en 1925, la revue L’Art vivant soulignait « le manque de gravité, sinon d’humour, des hauts-reliefs dorés de M. Max Blondat » ! Vérité d’hier n’est plus celle d’aujourd’hui !

5. Les Baigneuses, Amédée de La Patellière, 1928

Baigneuses à Bandol, Amédée de La Patellière, 1928, huile sur toile
Baigneuses à Bandol, Amédée de La Patellière, 1928, huile sur toile

Est-ce ces femmes très Années folles, portant un carré court, qui m’ont attirée, dans ce tableau ? Ou plutôt cette mer turquoise, qui vient ajouter une couleur de plus à la riche gamme chromatique de l’œuvre ? Ou encore le côté presque cinématographique des gros plans ? Je ne sais pas trop. 

Mais en tout cas, Amédée de La Patellière, artiste longtemps oublié, a réussi ici une originale scène de bain de mer. Qui évoque, dès le premier regard, les mythiques Années folles. 

À voir aussi, au fil des salles…

Beauvais-MUDO-L-Ange-et-l-Enfant Pietro Tenerani 1859 Marbre
L’Ange et l’Enfant, Pietro Tenerani, 1859, marbre
Beauvais MUDO Village au bord de l'eau, Théophile-Narcisse Chauvel, vers 1870, huile sur papier marouflé sur toile
Village au bord de l’eau, Théophile-Narcisse Chauvel, vers 1870, huile sur papier marouflé sur toile
Beauvais MUDO Étude de ciel, Vilhelm Kyhn, vers 1872, huile sur toile
Étude de ciel, Vilhelm Kyhn, vers 1872, huile sur toile
Canal à Venise, Paul Leroy, 1882, huile sur toile
Canal à Venise, Paul Leroy, 1882, huile sur toile
Intérieur de la basilique San Vitale à Ravenne, Paul Leroy, 1882, huile sur toile
Intérieur de la basilique San Vitale à Ravenne, Paul Leroy, 1882, huile sur toile
Beauvais MUDO La Jeunesse de Raphaël Sanzio, dit Raphaël enfant, Eugène Aizelin, 1887, plâtre
La Jeunesse de Raphaël Sanzio, dit Raphaël enfant, Eugène Aizelin, 1887, plâtre
Beauvais-MUDO-Serrurier-Bovy-decor-hall
Ensemble mobilier réalisé pour le décor d’un hall, Serrurier-Bovy, vers 1901
Beauvais MUDO L'Âge d'or, ensemble décoratif pour l'hôtel particulier du prince de Wagram, Maurice Denis, 1910-1912, huile sur toile
L’Âge d’or, ensemble décoratif pour l’hôtel particulier du prince de Wagram, Maurice Denis, 1910-1912, huile sur toile
Beauvais MUDO Les Brancardiers, Jean-Georges Cornelius, vers 1924, huile sur carton
Les Brancardiers, Jean-Georges Cornelius, vers 1924, huile sur carton
Beauvais MUDO La Danse, dit Le Repos de Diane, François-Xavier Roussel, 1937, huile sur toile
La Danse, dit Le Repos de Diane, François-Xavier Roussel, 1937, huile sur toile
Le Grand Intérieur, Marcel Mouly, 1949, huile sur toile
Le Grand Intérieur, Marcel Mouly, 1949, huile sur toile

Le MUDO de Beauvais en pratique

Beauvais-MUDO-pilierMUDO-Musée de l’Oise, 1 rue du Musée, 60 000 Beauvais.

03 44 10 40 50

mudo.oise.fr

Ouvert tous les jours, sauf le mardi, de 10 h à 13 h et de 14 h à 18 h.

Le Palais est accessible aux personnes à mobilité réduite, excepté l’exposition temporaire.

Entrée gratuite. 

À voir dans les cabinets d’art graphique, qui accueillent des œuvres rarement sorties des réserves, en raison de leur fragilité :

  • Jusqu’au 2 février 2026, Henri Deglane (1855-1931), architecte voyageur.
  • Jusqu’au 9 février 2026, Les Années folles, la femme, la mode…

Beauvais MUDO pièce pour les enfantsTous les rendez-vous (visites guidées, visites en langue des signes, visites avec une philosophe ou avec une sophrologue, ateliers pour les enfants, conférences…) sont  sur mudo.oise.fr

Pour les adeptes du train, le MUDO est situé à environ 15 minutes à pied de la gare de Beauvais.

Pour ceux qui préfèrent prendre leur auto, le parking Saint-Quentin (gratuit) est à 5 minutes à pied. Tandis que les parkings Foch et Calvin (payants) sont à 2 minutes à pied. 

À noter, l’espace dévolu aux enfants, aussi sympa et accueillant que coloré !

 

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